Bien que n'étant en définitive qu'un simple accessoire, la cravate est dotée d'un pouvoir exceptionnel : elle peut grandement influer sur la réussite d'un entretien d'embauche, sur l'accès à un restaurant étoilé, et dans un environnement plus professionnel, sur l'image de sérieux que projette une personne ; en somme, le choix d'une cravate peut en dire long sur qui la porte.
Par exemple, l'image d'en-tête : une cravate Brioni "Regiment Tie" violette. Exemple de cravate typiquement mixte dans son usage ; convient à un environnement sérieux ou relaxé, voir même carrément "frat-boy". Mais attention à ne pas marcher sur les plates-bandes d'un club ou d'une organisation ayant fait d'un motif son motif, comme il est coutume de faire dans le monde anglo-saxon.
Stefano Ricci, Paisly gris-lavande. Un beau paisley bien assorti, communique souvent une forme d'effronterie chic et de véritable recherche esthétique, mâtinée d'un brin de nostalgie.
La cravate Sulka vintage. Extrêmement rare, un bel accessoire que beaucoup d'aficionados apprécient.
«Il y a quelque chose d'audacieux dans le port d'une cravate en soie tricotée[...]», dit Michael Drake.
La plus vieille occurrence connue de la cravate a été trouvée en Chine, dans le gigantesque mausolée du premier empereur Chinois, Shih Huang Ti (enterré en 210 A.D, la tombe ne fut redécouverte qu'en 1974 près de l'ancienne capitale chinoise de Xian).
Terrifié par la mort, l'empereur voulait sacrifier son armée entière afin qu'elle l'accompagne dans l'au-delà. Ses conseillers parvinrent à l'en dissuader, lui proposant à la place d'être enterré avec des répliques en terre cuite de son armée personnelle. Reproduits grandeur nature avec un impressionnant sens du détail, les 7500 soldats de l'armée impériale furent ainsi immortalisés en tenue de combat. Aucune statue n'est identique, sauf sur un point… ils portent tous une pièce de tissu autour du cou.
De nombreuses sources affirment cependant que les Chinois ne portaient pas de cravate ou d'accessoire équivalent à l'époque. La question de pourquoi les statues en sont dotées reste et restera sans doute sans réponse définitive. Ceci étant, la soie étant un tissu rare et précieux dans la Chine impériale, leurs foulards symbolisaient probablement, tout simplement, un haut degré de prestige et d'honneur.
Le moment est venu de tirer un coup de chapeau à la Croatie pour sa contribution en la matière. Durant la guerre de Trente Ans (1618-1648), de nombreux mercenaires Croates furent employés dans toute l'Europe. Leur uniforme traditionnel comportait, entre autres, une écharpe nouée autour du cou de façon similaire à nos noeuds de cravates contemporains.
Un peu d'histoire : nous sommes à Prague, en l'an 1618. Deux gouverneurs catholiques Hasbourgeois et l'un de leurs domestiques, après une dispute intense avec une délégation protestante de Bohême venue contester la fermeture de deux temples dans la région, furent jetés par une fenêtre située au troisième étage. Ils survécurent, sauvés par des anges (selon les catholiques) ou par un tas de fumier ayant amorti leurs chutes (selon les protestants). Cet incident connu sous le nom de la « deuxième défenestration de Prague » mit définitivement le feu aux poudres entre catholiques et protestants, et fut l'une des causes directe de la guerre de Trente Ans. Des mercenaires Croates furent donc appelés pour combattre du côté des Hasbourg d'Espagne. D'une brutale efficacité sur le champ de bataille, ils ne manquèrent cependant pas d'éblouir l'Europe par l'impeccable classe de leurs écharpes nouées autour du cou.
Certains affirment même que le mot « cravate » serait une déformation du mot « Croate » ! En effet, les mercenaires stationnés à Paris firent une telle impression que les élégants Français ne tardèrent guère à emprunter certains éléments de la tradition vestimentaire militaire Croate, et tout particulièrement cette pièce de tissu nouée autour du cou...
La cravate fit donc une entrée fracassante dans le cercle fermé de la bourgeoisie de l'époque. Considérée comme un symbole d'élégance et d'élitisme culturel – en raison de son origine étrangère – la cravate fut rapidement adoptée partout en Europe. De nos jours, il existe tellement de variétés de tissus, de motifs, et de techniques de nouage différentes que nous en avons définitivement perdu le compte.
Après plusieurs générations passées à favoriser le confort et la praticité dans tous les secteurs de la vie, et ce parfois jusqu'à l'excès, nous sommes aujourd'hui témoins d'un véritable regain d'intérêt pour les objets artisanaux. Peut-être éprouvons nous (enfin ?) une forme de lassitude devant la foule d'objets industriels et génériques présents dans notre quotidien. D'ailleurs, à tort ou à raison, les remèdes dits « naturels » ne sont-ils pas souvent considérés avec plus de bienveillance que les médicaments « chimiques » ? Et une lettre écrite à la main n'aura t'elle pas souvent plus de poids qu'un simple e-mail ?
La cravate effectue également son grand retour dans ses formes les plus traditionnelles et de nombreuses maisons en Italie et en France proposent des cravates sept plis dites "à l'ancienne", comme le petite maison Howard's à Paris (voir ci-dessous.)
Que vous n'aimiez pas devoir vous habiller pour une occasion (quelle qu'elle soit), ou qu'au contraire, vous ne viviez que pour cela, ne perdez jamais de vue que le choix d'une cravate en dit bien plus long sur votre personnalité et vos intentions que vous ne pourriez le croire. Une cravate communique en effet de nombreuses choses : elle peut refléter votre sérieux et votre autorité ou, au contraire, témoigner d'une approche plus humble et détendue de l'existence. Elle peut également être la messagère d'un statut ou d'une convention, et d'une multitude d'autres choses encore.
La cravate est un formidable outil de communication qui, si elle est de nouveau comprise et maîtrisée par les hommes d'aujourd'hui, pourrait bien présager d'un vrai nouvel âge d'or de l'élégance masculine.
SN