Lorsque j’ai commencé à m’intéresser au monde sartorial, je n’avais presque aucune notion des règles et des fondements qui le régissaient. J’entrais tout juste dans mes 20 ans (notez que j’écris ces lignes 4 ans plus tard), mon style vestimentaire était épouvantable, et je n’avais aucune idée de ce que l’élégance pouvait vraiment être. A ce tableau très sombre venait néanmoins s’opposer un point positif : les connaissances étaient à portée de main. Découvrir PG a été un formidable accélérateur d’apprentissage, et je pourrais également citer Bonne Gueule ou Jamais Vulgaire qui m’ont considérablement aidé dans ma démarche.
Ceci étant, et malgré tous les conseils avisés de mes mentors, certaines idées un peu farfelues me sont venues. Je dois même à l’honnêteté de concéder que j’ai commis beaucoup d’erreurs. Je vous propose d’en passer quelques-unes en revue dans cet article – en vous souhaitant ainsi de ne pas les commettre.
Lorsque j’ai entamé ma démarche sartoriale, et plus précisément lorsque j’ai pu passer ma première commande chez un tailleur, j’ai découvert ce très bel objet qu’on appelle une « liasse » - ni plus ni moins qu’un petit catalogue des tissus disponibles, triés selon les couleurs, les drapiers et la saison. Et je me dois d’alerter les plus jeunes ici : l’expérience est particulièrement addictive. Examiner soigneusement ces rectangles procure un plaisir tout à fait fascinant, et on se laisse aller à imaginer l’allure qu’aurait le vêtement une fois confectionné dans tel ou tel tissu.
L’erreur que j’ai commise ? Arrêter mon choix sur des motifs et des tissus trop particuliers. Lassé des couleurs et des matières fades du prêt-à-porter, débordé par la joie de voir passer tant d’options plus séduisantes les unes que les autres, j’en ai oublié la sobriété nécessaire du débutant. Je vous laisse vous en rendre compte par vous-même :
Ne nous méprenons pas : les vestes faites de ces tissus me plaisent beaucoup, et j’éprouve à présent une sincère tendresse (mêlée d’amusement) à leur égard. Mais très vite, je me suis rendu compte qu’elles compliquaient énormément la composition de mes premières tenues sartoriales. La coordination des couleurs – car évidemment, il s’agissait de vestes sport, donc dépareillées – était tout bonnement infernale. Ces deux pièces symbolisent une sorte d’envie irrésistible de ne pas faire comme tout le monde, intention qui n’est d’ailleurs pas condamnable en soi – ceci étant, si j’avais à recommencer aujourd’hui, j’opterais sans hésiter pour des vestes sport nettement moins sophistiquées, pour des raisons de pure praticité.
Mon envie d’acquérir de beaux souliers patinés (c’est-à-dire retravaillés par un artisan qui se charge de donner au cuir la couleur de votre choix) a commencé un peu avant la passion pour les costumes. Ceci explique là encore le fait que je me sois jeté sur des patines magnifiques sans me demander comment je les intègrerais à mes tenues. C’est un fait : ces pièces étaient difficiles à insérer dans une garde-robe à peine entamée.
Je ne remets pas en question leur beauté intrinsèque : ce sont des souliers que j’entretiens avec soin, et que j’ai plaisir à porter quand le reste de ma tenue n’est pas trop chargé. Mais je ne saurais que trop conseiller de vous diriger dans un premier temps vers des couleurs plus polyvalentes – le marron emportant aujourd’hui bien volontiers mon suffrage - ou des patines bien pensées.
L’une des grandes révolutions de ma garde-robe a été l’achat de mes premières chemises. Les fidèles de PG savent qu’Hugo et Sonya ont souvent rappelé l’importance capitale de la chemise dans la composition d’une tenue : un très beau costume pourra facilement être ruiné par une chemise à la coupe désastreuse.
Mon problème n’est sûrement pas un cas isolé : les séries qui m’ont poussé à m’intéresser au style sartorial (avec, en première place, bien sûr, Peaky Blinders) m’ont mis en tête des types de col bien trop spécifiques : ici, le tab-collar, le pin-collar, et les cols club. Une fois de plus, j’ai fait passer mes envies d’acquérir une pièce un peu excentrique avant les besoins de polyvalence.
Je crois par ailleurs qu’un autre problème se posait : je n’avais pas réfléchi aux formes de cols qui convenaient le mieux à ma morphologie. Je vous conseille de ne pas suivre mon exemple, et d’aller consulter sans plus attendre l'article de Sonya sur ce sujet.
La passion sartoriale est une passion onéreuse. Je n’ai que trop tardivement tourné mon regard vers la seconde main pour essayer de compléter ma garde-robe sans faire d’excès. J’avais la chance d’être à Paris et donc de pouvoir fréquenter des friperies copieusement fournies ; Vinted m’a également permis de faire depuis quelques belles acquisitions.
C’est indéniable, lorsque l’on dispose d’un budget serré, la seconde main est un très bon atout. Parmi tous les arguments que l’on peut citer en sa faveur, je veux surtout en convoquer un: la possibilité de faire des expérimentations à moindre coût. C’est en friperie que je me suis essayé à porter le velours-côtelé, chose que je n’aurais jamais tentée chez un tailleur. C’est également en voyant passer certaines coupes originales sur internet que je me suis dit «pourquoi pas ?». Cette possibilité d’affiner ses goûts tout en faisant des essais dont l’impact financier restera limité est très précieuse: elle nous permet d’en apprendre plus sur ce qui nous plaît, et surtout, ce qui convient à notre silhouette. J’ajouterai que les vestes et les costumes qui m’ont valu le plus de compliments étaient tous des achats de seconde main.
Ce point découle assez naturellement du précédent. La seconde main est le meilleur moyen de se constituer une collection de cravates suffisante. Je dois confesser que j’avais au départ sous-estimé l’importance de cet accessoire, considérant qu’une tenue chemise ouverte suffisait sûrement déjà. Je me contentais le reste du temps d’une poignée de cravates, et ne comprenais pas pourquoi mes tenues finissaient par m’ennuyer. La raison en était pourtant simple : faire subir de légères variations de couleur à ses tenues en incorporant une teinte ou une nuance nouvelles suffit à donner l’impression de porter un nouveau vêtement. Porter la cravate, et en changer tous les jours, procure un vrai plaisir. Je ne peux donc que recommander de chercher des cravates en seconde main, afin de se constituer une collection généreuse sans prendre de risques.
Ce point a déjà été abordé par Hugo dans la série « Comment j’ai constitué ma garde-robe », et, au vu de la date de publication de mon article, j’imagine que la question ne semblera pas futile – mais tout de même, si cet article doit être lu en plein hiver par de nouveaux lecteurs, je préfère le préciser : porter des tenues sartoriales l’été demande une petite anticipation. Je recommande de guetter les pièces qui vous intéressent plusieurs mois avant le début de la période estivale, afin de ne pas être pris de court. En ce qui me concerne, j’ai là aussi commis l’erreur de n’acquérir au départ que des vestes doublées, ou des chemises d’un coton particulièrement épais, ce qui a rendu mes premiers étés particulièrement frustrants. Envisagez le lin dès que vous le pouvez : c’est une matière incroyable, son comportement est fascinant et elle sera toujours plus accessible que des options comme le seersucker.
Ne voyez pas dans ces énoncés des règles immuables. Le but de cet article est bien de vous renseigner sur les écueils qui peuvent guetter un novice de l’art sartorial, et non d’interdire quoi que ce soit. Sans doute jugerez-vous certains points discutables, et ce sera l’occasion d’un échange fort intéressant – en attendant, je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour un nouvel article !