Que diriez-vous de dégainer une montre de gousset contemporaine abritant un mouvement de manufacture ?
Ajoutée l’année dernière à la gamme de la jeune, mais remarquable, maison Frédérique Constant, la Pocket Watch propose une interprétation à la fois classique et actuelle de la montre de gousset.
Profitons-en pour rappeler que le terme gousset désigne, en architecture, une pièce de charpente, en habillement, une pièce de coton ou de soie placée à l’entrejambe d’un collant afin de pouvoir le porter à même la peau, ou, et c’est bien entendu le cas qui nous intéresse, une pièce de tissu située sur un gilet à hauteur d’aisselle, permettant d’y ranger la montre éponyme.
Fidèle au principe de la montre Lépine, la Pocket Watch Frédérique Constant est équipée d’une couronne – la pièce qui permet d’actionner la tige de remontoir située à 12 heures – elle-même coiffée par un anneau où s’accroche la chaîne.
Le modèle que nous avons eu le plaisir d’essayer est en acier – boitier et chaîne – mais la Pocket Watch est également disponible dans une version plaqué or rose.
Son cadran, qui peut paraître blanc sur les photos, diffuse en réalité un subtil reflet argent mettant en valeur le fin travail de guillochage effectué au centre. Les index romains sont appliqués à la main – on notera qu’à 4 heures, Frédérique Constant (comme bien d’autres) a retenu le IIII en lieu et place du IV, afin de préserver un équilibre visuel avec le VIII qui lui fait face à 8 heures.
Sous le saphir, heures et minutes sont indiquées par des aiguilles Breguet, noires, comme la seconde centrale. Par parenthèse, d’aucuns reprochent à la marque de trop puiser chez Breguet et Patek Philippe certains éléments de style. Nous verrons cependant que la marque a su également se distinguer par un savoir-faire unique.
Le contraste optimal et la disposition très aérée des éléments sur le cadran confèrent à cette montre une excellente lisibilité.
Côté littérature, le cadran arbore les inscriptions « Frédérique Constant », « Genève » et « Manufacture » sur autant de surfaces lisses lesquelles – par contraste avec le guillochage – forment un relief léger mais fort plaisant pour l’œil. Un vrai raffinement que seul un examen attentif permet d’apprécier pleinement.
Enfin, à 6 heures, le label « Swiss Made » – dont nous avons précisé les contours lors de l’essai de la Meistersinger Pangaea Day Date rappelle que la Pocket Watch a vu le jour en Suisse.
Lancée en 1988 par le couple Aletta et Peter Stas (également propriétaires d’Alpina), Frédérique Constant conçoit et assemble en effet ses montres à Plan-les-Ouates, dans le Canton de Genève, au cœur d’une manufacture indépendante des grands groupes horlogers. De fait, chaque étape de la réalisation de leurs montres est effectuée en interne : production des composants, assemblage des calibres, assemblage manuel des montres. Le contrôle qualité, quant à lui, est réalisé par des machines numériques.
En 1994, la jeune maison Frédérique Constant s’est illustrée en dévoilant son modèle Heartbeat qui mettait en scène le mécanisme de la montre par le biais d’une fenêtre ouverte sur la roue de balancier. Non protégé, le concept fut copié dès l’année suivante…
Quatre ans plus tard, lors du grand rassemblement horloger de Baselworld, la marque se retrouva une nouvelle fois sous le feu des projecteurs en dévoilant son premier calibre Tourbillon Manufacture.
Non seulement cela lui ouvrit les portes du cercle restreint des horlogers ayant maitrisé cette si délicate et ô combien emblématique complication, mais témoigna également de la capacité d’innovation de cette jeune maison ayant su intégrer plusieurs caractéristiques uniques dans son tourbillon, comme une roue d’échappement en Silicium. Légère et réduisant de façon significative les frottements, cette pièce autorise en effet un rendement énergétique nettement supérieur.
Rappelons que quel que soit le nombre de complications offertes par un garde-temps, son unique source d’énergie réside dans son ressort moteur. Par conséquent, une économie d’énergie telle que celle offerte par la roue en Silicium du Tourbillon Manufacture apporte une plus-value significative à l’ensemble de l’industrie.
Plus récemment, en 2009, la marque fit encore sensation avec Maxime, un modèle animé par un calibre de manufacture affiché à « seulement » 1950 euros, soit le moins cher du marché.
Aujourd’hui distribuée dans plus de 2800 points de vente dans le monde, Frédérique Constant a développé 18 versions de ses calibres maison. Celui qui équipe la Pocket Watch est visible à travers le fond saphir, lui même abrité derrière un fond de boîte monté sur une charnière qui se déverrouille par une pression sur le poussoir situé à 1 heure.
Le FC 700 est un mécanisme à remontage manuel. Il offre une réserve de marche de 42 heures, comporte un stop seconde – ceux qui apprécient de pouvoir régler leur garde-temps à la seconde près lui en sauront gré – et se trouve orné d’une décoration circulaire appelée perlage, que l’on retrouve également sur la face cachée du fond/couvercle.
Procéder au remontage de cette belle pièce de 45 mm de diamètre et assister au jeu des engrenages autour de leur vis bleuie n’est pas le moindre des plaisirs offerts par ce modèle.
Lorsque vous êtes en (bonne) compagnie, extraire de votre gousset la Pocket Watch revient à initier à tous les coups une conversation entre amateurs. Sachez d’ailleurs que ceux devant qui vous l’exhiberez voudront TOUS à leur tour la toucher.
Si vous ne portez pas toujours le gilet, vous pouvez, bien entendu, choisir d’accrocher la chaîne au passant de votre ceinture et déposer le boîtier dans une poche de pantalon mais, à ce jeu, j’ai trouvé, à titre personnel, les deux alternatives aussi inconfortables l’une que l’autre : à l’avant, la montre marque un relief tandis qu’à l’arrière, vous courrez le risque de vous asseoir dessus. Le « must » reste donc, indiscutablement, la poche gousset d’un gilet.
Depuis longtemps décorrélée de sa fonction première – donner l’heure – la montre relève aujourd’hui autant du marqueur social que du pur objet de plaisir. Elégante, originale et fort bien réalisée, la Pocket Watch de Frédérique Constant y ajoute une volupté certaine : cet hommage aux pièces d’antan offre en effet à son porteur un agrément tactile indéniable.
Voici un objet que l’on sort de sa poche pour le manipuler, que l’on se surprend à caresser du pouce, qui passe de main en main, que l’on porte à son oreille et dont on observe le mouvement de balancier, au bout de sa chaine, en prenant tout son temps.
Un véritable luxe.
Emmanuel Laurent
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© Photo d’ouverture, photo 2, 4, 8 et 10 : Sébastien Lê.
Frédérique Constant Pocket Watch
Boîtier 45 mm acier inoxydable ou plaqué or rose, étanche jusqu’à 30 mètres
Verre saphir
Cadran : argenté, guilloché, chiffres romains appliqués à la main
Aiguilles polies noires
Chaîne en acier ou acier plaqué or rose
Calibre manufacture à remontage manuel FC-700 PW 18 rubis
Réserve de marche : 42 heures
Tarifs
– Version acier : 2.850 euros
– Version plaqué or rose : 3.350 euros
Costume : Husbands Paris
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